24.06.2024

Du Code Civil à la jurisprudence, mieux comprendre le cadre légal de la protection des majeurs

Dans le domaine de la protection des personnes majeures, qu’il s’agisse des décisions des tribunaux ou de l’exercice des mandats confiés aux familles ou aux professionnels, le cadre légal se fonde principalement sur le Code Civil. Mais il faut également prendre en compte l’importance d’autres dispositions comme, par exemple, la référence à d’autres codes, à des décrets ou des arrêtés. Et dans des situations litigieuses, il ne faut pas sous-estimer la valeur de la jurisprudence qui peut apporter des réponses là où le droit est parfois source d’interprétation.

Comment s’y retrouver ? 

Les lois

La protection des personnes majeures en France est principalement réglementée par le Code Civil avec plus d’une centaine d’articles. Il faut y ajouter d’autres textes du Code Civil relatifs au droit commun (celui qui s’applique à tous), par exemple, le droit des personnes, celui relatifs aux biens, aux contrats…

Le Code de Procédure Civile fait également référence. Il a pour fonction d’apporter des précisions utiles quant à l’application pratique des procédures qui résultent des articles du Code Civil. Pour la protection des majeurs, ce sont également une centaine de dispositions qui y sont énoncées (par exemple, le contenu d’une demande de protection, son instruction, la procédure d’appel d’une décision du juge des tutelles).

D’autres codes, comme celui de l’Action sociale et des Familles (par exemple au sujet des droits des usagers des services MJPM) ou le Code de la Santé Publique (sur les dispositions médicales relatives aux majeurs protégés) peuvent être également cités.

Le site public legifrance.gouv.fr permet la consultation de ces différents articles de loi.

Les ordonnances

Les ordonnances relèvent du même domaine que les lois. Le plus souvent, elles sont utilisées pour modifier des aspects particuliers d’une loi déjà existante. Elles sont rendues par le gouvernement en place sous réserve d’une autorisation préalable du Parlement. Les ordonnances évitent ainsi de passer par la procédure législative habituelle, ce qui permet de limiter les délais de leur application.

Dans la protection des majeurs, les ordonnances qui sont rendues ont souvent pour objectif d’apporter des précisions à une loi déjà existante. Par exemple, l’ordonnance n° 2020-32 du 11 mars 2020 a conduit à modifier des éléments de vocabulaire d’articles de lois du Code de la Santé Publique (ces articles concernant le domaine de la santé des personnes majeures protégées).

Les décrets, les arrêtés et les circulaires

Sur un plan hiérarchique, les décrets, les arrêtés et les circulaires se situent en dessous des lois et des ordonnances. Leur fonction est d’apporter des précisions techniques quant à leur mise en œuvre. Ainsi, une loi peut être votée mais elle pourra préciser que son application ne sera effective qu’à la parution d’un décret au Journal Officiel. 

Par exemple, pour la loi du 5 mars 2007 réformant la protection des personnes majeures, certains décrets d’application ne sont parus qu’à la fin du mois de décembre 2008 (alors qu’au plus tard cette loi devait se mettre en œuvre au 1er janvier 2009).

Décrets : il s’agit d’actes réglementaires pris par le président de la République ou le Premier ministre. Les décrets définissent les modalités d’application d’un texte de loi ou d’une ordonnance. Par exemple, le décret 2008-1484 du 22 décembre 2008 a permis de catégoriser les différents actes d’administration et de disposition relatifs à l’exercice des mesures de protection (la loi du 5 mars 2007 n’entrant pas dans le détail de ces actes).

Arrêtés : ce sont des décisions administratives dont la valeur se situe en dessous de celles des décrets. Leur rôle consiste à rendre exécutoire une décision prise à l’échelon ministériel ou interministériel. Les préfets ou les maires peuvent également prononcer des arrêtés. Dans la protection des personnes majeures, les arrêtés ne peuvent être pris qu’à l’échelon national. On peut citer, par exemple, l’arrêté du 31 août 2018 qui a actualisé le coût des mesures de protection quand elles sont exercées par des mandataires professionnels.

Circulaires : il s’agit d’actes administratifs dont l’objet est d’apporter des précisions et des explications techniques après la parution d’un texte de loi, d’une ordonnance, d’un décret ou d’un arrêté. Par exemple, la circulaire du 25 mars 2019 a permis de préciser un certain nombre de points de la loi du 23 mars 2019 réformant des aspects de la protection des personnes majeures (le droit de vote, le mariage, le PACS, l’ouverture ou la clôture des comptes bancaires…).

La jurisprudence

On peut définir la jurisprudence comme l’ensemble des décisions rendues par les tribunaux au sujet de situations précises (ces situations ayant soulevé une (ou des) question(s) d’interprétation juridique).

Dans certains cas, la jurisprudence permet donc aux tribunaux de statuer quand le cadre légal est trop imprécis ou quand il présente un vide juridique.  Les tribunaux se réfèrent alors à ce qui a pu être déjà décidé dans des situations similaires par des juridictions supérieures (par exemple, les Cours d’Appel, les Cours de Cassation, le Conseil d’Etat ou des Cours européennes ou internationales).

Quand un jugement « fait jurisprudence », c’est parce qu’il va pouvoir inspirer d’autres décisions judiciaires similaires à venir. Si la jurisprudence n’a pas force de loi, elle peut influencer, à termes, son évolution ou sa modification.

La jurisprudence trouve donc toute son utilité pour mener des actions en justice s’avérant complexes. Dans ce cas, son intérêt est d’apprécier leurs possibilités de réussite ou d’échec (en référence à des jugements déjà prononcés pour des affaires semblables). Cependant, et au gré des situations et de leur particularité, la jurisprudence ne présume pas forcément de son application.

Le domaine de la protection juridique des majeurs n’échappe pas à la jurisprudence.  De nombreux exemples existent. On peut citer notamment la décision récente de la Cour de cassation du 24 mars 2024 (pourvoi n° 22-13.325). Celle-ci a considéré qu’une personne souffrant d’une cécité totale, dépendante de tiers pour la gestion de ses actes de la vie civile et qui avait été placée sous curatelle renforcée, était en capacité d’exprimer sa volonté sans altération de ses facultés. Sa mise sous curatelle a donc été annulée.

Il est possible de retrouver de la jurisprudence sur le site legifrance.fr mais aussi sur le site de jurisprudence par Lefebvre Dalloz. Ce site propose un moteur de recherche performant qui permet, sur des sujets précis, de retrouver des éléments de jurisprudence répondant aux recherches effectuées.

 

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